Origine du marais

L'être humain connait les milieux naturels du marais de Lavours depuis plus de 8 000 ans.

En 1984, la Réserve Naturelle du marais de Lavours a été créée pour préserver ces milieux mis en danger depuis le début du XXème siècle.

Des humains ont vécu dans le marais de Lavours il y a 8 000 ans.

Gravure dans la pierre d'un abri sous roche au marais de Lavours
Gravure dans la pierre d'un abri sous roche au marais de Lavours

Dès le retrait des glaciers würmiens, au Mésolithique (il y a environ 8 000 ans), des hommes ont vécu dans le marais de Lavours, comme l’attestent des ossements retrouvés dans un abri-sous-roche à Culoz.

La vocation pastorale du marais de Lavours remonterait à plus de 30 siècles ?

À partir de l’âge du Bronze (-800 av. J.-C.), le parcellaire s’organise. Les basses plaines marécageuses sont souvent dévolues au pastoralisme, avec l’occupation d’abris en périphérie des zones de pacage des troupeaux.

Ainsi, le mollard de Lavours offre un abri-sous-roche orné de nombreuses gravures, dont certains motifs évoquent peut-être une représentation du parcellaire agricole. Si c’était le cas, la vocation pastorale du marais de Lavours remonterait à plus de 30 siècles !

LES PREMIERS AGRICULTEURS SÉDENTAIRES S'INSTALLENT À PARTIR DE – 3 700 AV. J.-C.

C’est à partir du Néolithique (-3 700 av. J.-C.) que leur présence se renforce avec un nouveau mode de vie : les premiers agriculteurs sédentaires s’installent sur les pentes bien exposées du Colombier et utilisent les ressources naturelles du marais (chasse, pêche…).

Instauration d'un pastoralisme d'envergure au marais de Lavours au XIIe siècle

Grange cistercienne de la commune de Lavours - Mai 2004 (Photo : F. Darinot)
Grange cistercienne de la commune de Lavours - Mai 2004 (Photo : F. Darinot)

Il faut attendre le XIIe siècle et l’implantation des moines pour voir s’instaurer un pastoralisme d’envergure dans le marais. Deux communautés monastiques principales se disputent la prairie pour leurs troupeaux de moutons : les chartreux d’Arvières, installés aux flancs du Colombier, et les moines cisterciens de l’abbaye de Hautecombe.

L'élevage s'intensifie au XVIIe siècle au marais de Lavours.

En 1494, la propriété du marais se partage entre les ecclésiastiques et Guillaume de Luyrieux, Seigneur de Montvéran (Culoz). Le premier fossé creusé dans le marais date probablement de cette époque : il séparait la prairie de Culoz (les bonnes terres) du marais tourbeux. Au XVIIe siècle, l’élevage s’intensifie sous l’influence d’Henri IV qui installe des relais de chevaux sur toutes les routes de France pour faciliter les voyages, comme à Talissieu et à Ceyzérieu où furent créés des dépôts d’étalons. L’apogée de l’élevage se situe au début du XIXe siècle, avec près de 5000 bêtes (vaches, chevaux, mulets) qui pâturaient les 2000 ha du marais, au moins une partie de l’année.

La production et les différentes utilisations de blache au marais de Lavours.

En 1494, la propriété du marais se partage entre les ecclésiastiques et Guillaume de Luyrieux, Seigneur de Montvéran (Culoz). Le premier fossé creusé dans le marais date probablement de cette époque : il séparait la prairie de Culoz (les bonnes terres) du marais tourbeux. Au XVIIe siècle, l’élevage s’intensifie sous l’influence d’Henri IV qui installe des relais de chevaux sur toutes les routes de France pour faciliter les voyages, comme à Talissieu et à Ceyzérieu où furent créés des dépôts d’étalons. L’apogée de l’élevage se situe au début du XIXe siècle, avec près de 5000 bêtes (vaches, chevaux, mulets) qui pâturaient les 2000 ha du marais, au moins une partie de l’année.

 

Le rythme des travaux était immuable : dès que le temps le permettait, parfois dès février, les bêtes étaient sorties des étables pour les mener paître dans le marais. Puis en avril, mai ou juin, on « fermait » les bonnes prairies, pour laisser pousser l’herbe en vue de la fenaison qui s’opérait fin juillet-début août, alors que la pâture pouvait continuer dans les grands communaux du centre de la tourbière. La récolte de la blache donnait lieu à de fréquentes querelles, parfois violentes, tant cette ressource était vitale pour les paysans. Lorsque les inondations du Rhône sablaient le marais avant les foins, la misère s’abattait sur les familles riveraines. Après l’enlèvement de la récolte qui partait jusque dans le Valromey distant de 15 km, le bétail retrouvait le marais pour une vaine pâture d’automne.

Après la Révolution française de 1789, le marais de Lavours a été partagé entre les communes et les privés.

Carte de Cassini du marais de Lavours (1758)
Carte de Cassini du marais de Lavours (1758)

Le statut communal du marais de Lavours est issu de la Révolution française de 1789. Les communautés rurales établies en bordure du marais et qui possédaient sans doute des droits d’usage n’ont pas eu de peine à obtenir la possession de ces terres ecclésiastiques. Le centre du marais, tourbeux et de mauvaise qualité, fut attribué aux communes alors que les meilleures terres (le finage) revinrent aux privés.

Une des conséquences du partage du marais fut la création de multiples petits fossés superficiels, destinés à délimiter les propriétés privées ou communales.

L'exploitation de la tourbe dans le marais a suivi la redistribution des terres.

C’est surtout à proximité d’Aignoz que les tourbières furent créées : n’ayant pas de bois pour leur chauffage, à l’exception d’une petite concession dans la forêt de Lavours, les habitants du hameau tiraient le « charbon des pauvres » à l’aide d’un outil spécial, le louchet.

L’exploitation de la tourbe dans le marais de Lavours ne fut jamais d’envergure, malgré plusieurs projets d’industrialisation qui apparurent avec la construction de la voie ferrée Genève-Lyon en 1857.

L’ultime tentative date de la dernière guerre, avec les tourbières de Culoz exploitées pour les pépiniéristes du département et pour le chauffage des logements de Grenoble, Lyon, Mâcon, jusqu’à Dijon, tant le charbon était rare à cette époque.

Carte des tourbières du Comte d'Arloz (1858)
Carte des tourbières du Comte d'Arloz (1858)

La crise du phylloxéra, qui toucha le vignoble bugiste en 1876, marque le début de l'abandon du marais.

Vue du marais de Lavours depuis les hauteurs, parcelles de peupliers et de maïs
Vue du marais de Lavours depuis les hauteurs, parcelles de peupliers et de maïs

En effet, le vignoble étant quasiment détruit, les besoins en blache pour pailler les rangs de vignes disparurent et la fauche connut un net déclin. Les riverains commencèrent alors à brûler certaines parties du marais pour empêcher les arbustes de l’envahir. L’exode rural du début du XXe siècle amplifia le ralentissement des pratiques agricoles dans le marais, d’autant que la mécanisation très difficile dans ce milieu ne compensait pas le manque de main d’oeuvre. A la fin de la guerre de 1914-18, les trois quarts du marais étaient déjà à l’abandon. Les brûlis hivernaux devinrent une pratique courante et bien souvent, à la faveur d’une forte bise, tout le marais s’embrasait, de Culoz jusqu’à Cressin-Rochefort.

La Politique Agricole Commune (PAC) des années 1970 a entrainé la disparition de l'élevage au profit de la céréaliculture.

Les années 1970 voient la mise en place de la Politique agricole commune qui pousse l’agriculture locale à changer rapidement, avec la quasi disparition de l’élevage, notamment de l’élevage dans le marais, au profit de la céréaliculture. À Culoz, un agriculteur achète plus d’une centaine d’hectares de tourbière, de peu de valeur, et entreprend la « bonification » de ces terres humides en creusant de multiples drains pour la culture du maïs. À Lavours, Béon, Cressin-Rochefort, les surfaces en maïs grandissent d’année en année.

 

Dans le même temps, les plantations de peuplier se développent sur les terrains limoneux du pourtour de la tourbière, nécessitant aussi le creusement de nouveaux fossés. Quelques bons prés en bordure du marais sont encore utilisés pour la pâture des vaches, mais sont définitivement abandonnés dans les années 1980. Les boisements se développent considérablement, tant en bordure du Séran que dans le marais lui-même, où l’aulnaie a complètement fait disparaître les prés humides de Talissieu et Béon. Ailleurs, c’est la roselière qui gagne les anciennes prairies, formant d’immenses peuplements que n’arrivent pas à contrôler les brûlis hivernaux.

Vue du Grand Colombier depuis la prairie inondable